Ce n'est pas encore demain qu'on reverra une femme en F1

il y a 2 mois | Olivier de Wilde

Bientôt cinquante ans depuis le dernier GP de Lella Lombardi en 1976. Malgré tous les efforts de la FIA, on n'a pas encore dégoté la perle rare. Les trois filles en F3 et Eurocup Formula Renault n'ont pas encore marqué un seul point. Après trois titres en W Series, Jamie Chadwick tente de rebondir aux USA en Indy Lights où elle vient de remporter sa première course.

Giovanna Amati et Désirée Wilson n'ayant jamais réussi à se qualifier pour un GP, il faut remonter à 1976 pour retrouver trace d'une femme au départ d'une course de F1. En 1974 et 1976, Lella Lombardi, deuxième fille seulement à piloter au sommet après Maria Teresa De Filippis en 1958 et 1959, a participé à douze épreuves du championnat du monde. Elle fut la seule d'ailleurs dans l'histoire à marquer un demi point.

Depuis, pas mal de filles ont testé en F1 ou ont été nommées pilotes de réserve. Certaines comme Suzie Stoddart, madame Toto Wolff, ont même eu l'occasion de rouler le vendredi en essais libres dans le cadre d'un GP. Mais il faut bien avouer qu'elles n'étaient pas compétitives et qu'il s'agissait avant tout d'opérations de charme ou de marketing.

Si l'on voit de plus en plus de femmes travailler dans le monde du sport automobile, ce qui est très bien d'ailleurs, y compris dans les paddocks de F1, si la FIA avec sa commission « Women in Motorsport » bien aidée par Richard Mille (qui soutient la Française Lilou Wadoux) et par les Iron Dames de Déborah Mayer font beaucoup pour susciter des vocations et mettre en avant les « Girls », force est de reconnaître qu'aucune d'entre-elles n'est aujourd'hui encore prête à se produire au sommet.

 

Pas de point pour les filles en F3 et Formula Regionale

 

Ok pour l'égalité des chances, mais il n'y a pas de comparaisons possibles aujourd'hui au niveau des résultats. En F3, Sophia Floersch occupe la 23ème place du championnat sans encore avoir réussi à inscrire un point (Top 10). Idem pour les deux représentantes des Iron Dames en Formula Regionale by Alpine avec actuellement un score toujours vierge pour la championne de la Formula Academy (le championnat féminin en lever de rideau de certains GP) Marta Garcia (25e) et Doriane Pin (33e) que certains ont un peu trop vite prise pour une prodige. La Française a un bon coup de volant, c'est indéniable. Mais elle a aussi un gros avantage de poids puisqu'elle pèse 46 kg casquée. Ce qui signifie qu'elle doit embarquer pas mal de lest en monoplace où tout le monde évolue au même poids, voiture et pilote compris. Ce qui n'est pas le cas en ELMS ou en WEC où elle a brillé précédemment. Or, le responsable de la BOP nous l'a encore confié à Francorchamps : 10 kg c'est 1,6 dixième au tour en GT3. Par rapport à un Maxime Martin, Doriane a donc une demie seconde au tour dans la poche. Un peu comme en kart quatre temps quand il n'y a pas de bac à plomb. Il est dès tout de suite plus facile de se distinguer. On l'a encore vu lors des dernières 24H avec les temps de Lilou Wadoux, particulièrement rapide. Au point de pouvoir accéder à la F1 ? Bien sûr que non.

L'Américaine Danica Patrick aurait pu y arriver, mais elle a refusé et préfère aujourd'hui commenter les podiums de F1 pour la Sky.

 

Chadwick a gagné aux States

 

Michelle Gatting (l'équipière de Sarah Bovy) et Betske Visser sont sans doute de vraies « Gold » aussi douées que pas mal de garçons de leur génération.

Jamie Chadwick, une Anglaise de 26 ans qui a déjà remporté deux championnats (British GT et MRF) avant d'être couronnée à trois reprises en W Series (les courses réservées aux filles) a été reprise dans la filière Williams et poussée par la FIA. Mais quand elle a testé voici quelques années en F3-R, elle était une bonne seconde moins rapide que les Piastri, Martins ou Colombo de l'époque. Elle est donc restée dans la compétition des filles. Et aujourd'hui elle essaie de se relancer aux Etats-Unis en participant avec le team Andretti au championnat Indy NXT (ex-Lights), l'équivalent de la F3 européenne avec un moins gros niveau toutefois. Aujourd'hui, elle occupe une belle 5ème place du championnat après sa victoire à Road America. C'est la première fois qu'une femme gagne à ce niveau depuis Pippa Mann en 2010 à Kentucky. Il ne serait pas surprenant de la voir évoluer dans le futur en IndyCar. Mais la voir débarquer en F1 sur base uniquement de ses résultats et sa vitesse de pointe s'annonce nettement plus compliqué.

 

Aucune remplaçante pour Sarah Bovy, un vrai problème pour les Iron Dames

 

Et notre Sarah Bovy dans tout cela ? C'est clairement l'une des meilleures « Bronze » (gentlemen drivers) au monde. Elle cumule d'ailleurs cette année les poles positions dans cette catégorie en tournant souvent plus vite que certains pilotes Silver. Un statut auquel, malgré tout le lobbying possible et un bon avocat, elle ne devrait plus pouvoir échapper en 2025. Oui, Sarah Bovy qui roule énormément, continue à progresser et reste jeune est clairement aujourd'hui une bonne Silver. Mais ce qui devrait la flatter l'embête très fort. Car elle sait bien que les récents succès des Iron Dames sont basés sur sa performance, lors des qualifs et souvent des premiers relais. C'est en grande partie elle qui propulse les « Dames » vers les sommets même si Rahel Frey, Michelle Gatting ou Doriane Pin ont souvent fait du très bon boulot aussi.

On l'a vu lors des 24H de Francorchamps. Pourquoi croyez vous que la Lamborghini est restée dans son stand suite au forfait de la Nandrinoise après son accident de Watkins Glen ? Car il n'existe pas de remplaçante à Sarah dans la catégorie Bronze ? Les jeunes filles issues du karting sont d'office classées Silver ou sont bien moins véloces que notre compatriote. Même une Vanina Ickx est encore trop jeune pour pouvoir être dégradée Bronze. Au-delà du problème que cela risque de poser pour la suite de la carrière de Sarah (car les filles Silver ne manquent pas), son passage au statut de Silver pourrait aussi mettre un terme à la belle histoire triomphante des Iron Dames et des filles qui battent les mecs.

En attendant, durant trois ans, elle en aura bien profité en révélant son bon coup de volant mais aussi une chouette forte personnalité (et quel charisme!) qui lui permettra certainement de rebondir. Sur les pistes ou dans les boxes avec un autre rôle au sein des Iron Dames...

Pour conclure, espérons que tous les efforts consentis pour la promotion des femmes dans le sport automobile permettent de susciter des vocations, que plus de filles courrent dans le futur en karting, en rallye, en monoplace. Car en étant plus de cent fois moins nombreuses, leurs chances d'accéder au sommet sont logiquement plus faibles. Mais soyons sûr que le jour où l'une d'entre elles aura le talent d'un Verstappen, d'un Hamilton ou d'un Norris, elle gravira les échelons beaucoup plus rapidement et facilement qu'un homme. Car ils sont très nombreux haut placés à espérer revoir un jour une femme disputer un GP de F1. Netflix en ferait en tout cas déjà un bel épisode...

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